Aube nouvelle

Ta vie
D’austères abois
Vint à manquer
D’attrait
Du crépuscule de son été
Tu avais oublié
Le trait

Mont Aoraï
Aux crêtes à l’infini
Tu viens casser le ciel
D’immense vert de gris

Soleil parti
De veines d’or strie
Le pâle azur bleu

De vaine lumière
De douceur alanguit
Les frêles moutons blancs
Posés là par le vent

Si doucement
Au temps discret
Du jour qui fuit
Dans l’orangé
Du lagon secret

Petites fusées vertes
Et bleues, puis la colline
Après le clocher rouge
S’enivrent à ta venue
Douce nuit
De Tahiti


Quand apparaissent les lumières
De la vie
Dans les petites tâches
Blanches timides enfouies
Dans ton vert
Qui bleuit
Terre
De Tahiti

Quand le blanc du papier
Et le gris du crayon
Se confondent enfin
Plénifiant nos extases
Aux balcons de ta nuit

Quand le regard se perd
Dans le rose confin
Des instants qui s’affrontent
Un reste d’aujourd’hui
Qui installe demain

Quand la nuée
Des cocotiers
S’estampe noire
Sur ton ciel bleu

Quand ta montagne
Sombre un moment
Bien qu’à regret
Pourrait sans pagne
Nous apeurer

Le somptueux
Scintillement
De la voûte
De tes cieux
Rend sans fin
Ton mystère
Heureux

GDB 08.12.85

Complainte

GDB 18.10.86

Couleurs

S’ouvrant féline au plaisir
La terre verte s’étire
Sous la caresse du rayon jaune
Perçant l’ouate gris bleu blanc

La terre verte rajaunit
A l’aube au soleil fauve
Quand le rayon qui la surprend
Sèche ses larmes de la nuit

La terre verte au soleil rajaunit
Par la lucarne bleue du ciel blanc gris

Terre si verte rayon si jaune
Terre du ver qui vire au fauve

Reflet si dense
Des couleurs profondeur
Douce plénitude de l’instant
Couleur

Ardeur
Essence des sens affûtés
Par l’agression de ta beauté
Lorsque l’enfant Soleil paraît

 

 

Le blanc bleu gris gris fanfaron
Referme son temps de coton
Murant le coin de bleu ciel pur
Derrière l’ouate blanc gris bleu mur

Puis les gris blancs cèdent au bleu
Pas un bleu pur encore gris bleu
Petit bleu gris deviendra blanc
Si l’ouate monte monte au vent

Ouates ouatées, hâtez-vous donc de vivre

Ouates, vois terre comme tu les dénigres

Ouate, où as-tu mis le tigre

De papier qui t’enivre

     GDB 16.05.86

Lueur stupeur

Dans ta lueur stupeur cœur qui ne dit pas non

S’assoit notre état d’être appétit quotidien

Du présent différé tisserand de nos liens


Avant qu’elle ne s’éteigne

Et les retours félons

Des mauvaises raisons

De la mort quotidienne

Goûte à ton fantasme juste un peu qu’il ne meure

Mais pas trop pour qu’il vive il n’y a pas d’erreur


Il n’y a que l’acquis de toutes nos déraisons

Chaque jour d’avenir

Te verra-t-il fleurir

Sur leurs grands tombeaux blancs

Tes meilleurs instants


Il n’y a que la vie si tu sais l’arrêter

Et nos amours toujours qui viennent l’animer

GDB 28.10.85

Soleil Prunelle

La lune vieille a pâli maintes fois
Au ciel quotidien de nos habitudes
Ne la vois-tu pas là au coin du toit
Lueur de gris sur nos décrépitudes

Être un fragment de soi
De l’humaine comédie
Chaque jour magnifie
Les levers de rideaux
De nos éclats de voix
N’entends-tu pas l’écho

Être un fragment de soi
Si tu le crois tu vis
Mais c’est si grand la vie
Il y a tant de vies
Tant de pièges d’oubli
Si tu les vois tu vis

Être un fragment de soi
Hier et aujourd’hui
Racontent un peu demain
Des amants éblouis
Garderons-nous la faim
Voilà pourquoi j’écris
Même quand je n’écris rien

Être un fragment de soi
La feuille est un cristal
L’encre en est le tain
Figeant d’élan vital
Les regards incertains
Atténuant l’usure
Des souvenirs futurs

Être un fragment de soi
Se convaincre qu’il reste
Dans les sarments célestes
Chaque instant à brûler
Et quand tout est à prendre
Au creux des matins tendres
Savoir tout voler

Être un fragment de soi
Et différer l’ennui
Laisser voguer ses choix
Au vent des appétits

Butiner fleur à fleur
Tous les champs d’énergie
Dérive ouverte à ton avis
Viendras-tu déchirer nos cœurs

 

Être un éclat de toi
Lueur de gris
Rose bleuie
Au cimetière des remords
Lueur de gris
Elle t’aime encore

 

 

 

 

Être un regard de toi
Instant d’appel
Pression de main
Soleil prunelle
A ton éclat l’œil est enclin

 

 

 

 

 

GDB 29.01.87 Papeete

Matin

En ton ciel un instant
Trois univers
Aux frontières enlacées

Le grand abrupt sombre
De l’Aoraï
De nuages
Oppressé
Aux queues de brume
Aux lentes volutes
Joueuses de ses pics

Univers d’ombre
Lourd et angoissant

Sur les crêtes
Piquetées de pins
Des hauteurs de Pamatai
Une couche grise
Basse légère mourante
Une autre blanche
Plus haute moins fournie
Plus dense plus tranchée
Découpant de larges fonds
De bleu pur vif et doux
S’en va blanchissante
Derrière les collines

Univers espoir
D’avenirs lumineux

Loin au delà de Faaa
L’envol
De larges nuages
Assis sur l’horizon
Enserrent l’espace et Moorea
Dans un halo gris laiteux

Univers lointain
D’errance à l’infini


En ton ciel
L’instant d’après
Plus de frontières

Mêmes enlacées

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le ciel est gris
Sur Tahiti

 

 

 

 

 

Tes univers
Sont rêveries

GDB 11.06.86